Mme Claire DELACOURT
Soutiendra vendredi 29 novembre 2024 à 13 h 30
Salle des Actes n° 009 à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3, Site Saint-Charles 2
une thèse de DOCTORAT
Discipline : Études romanes spécialité Études hispaniques et hispano-américaines
Titre de la thèse : Documenter et réécrire le fait criminel : Ayotzinapa et la narration mexicaine contemporaine
Composition du jury :
- M. Karim BENMILOUD, Professeur, Université Paul-Valéry Montpellier 3, directeur de thèse
- M. Raphaël ESTÈVE, Professeur, Université Bordeaux Montaigne
- Mme Annick LOUIS, Professeure, Université de Franche-Comté
- Mme Marie-Agnès PALAISI, Professeure, Université Toulouse - Jean Jaurès
- M. Fabrice PARISOT, Professeur, Université de Perpignan Via Domitia
Résumé de la thèse :
Le 26 septembre 2014, des attaques violentes visaient les étudiants de l’école normale rurale Isidro Burgos d’Ayotzinapa, dans l’État du Guerrero (Mexique). Ces événements ont causé 6 mort·es, des dizaines de blessé·es et la disparition de 43 étudiants. L’implication de plusieurs forces policières et la présence de militaires mit en lumière les liens entre le pouvoir officiel et le crime organisé, ainsi que le recours à la disparition forcée. Une version officielle, qualifiée de « vérité historique » et destinée à déresponsabiliser l’État, fut imposée avant la fin de l’enquête, intensifiant l’indignation populaire et nourrissant un mouvement de contestation d’une ampleur exceptionnelle.
Cet événement a également engendré un phénomène éditorial avec la publication d’une trentaine d’ouvrages – principalement des enquêtes, essais, chroniques et témoignages – soulevant la question des conditions de narration du fait criminel. Cette thèse propose d’examiner cette problématique à travers l’étude de six récits publiés dans les années suivant les faits. Elle analyse comment ces textes remettent en question l’opposition entre art et activisme politique, en interrogeant les interactions entre les dimensions esthétique, éthique et politique. L’étude mobilise des outils narratologiques pour analyser ces récits dans le contexte mexicain de la « Guerra contra el narco ». La première partie de cette thèse retrace la genèse des récits alternatifs d’Ayotzinapa, en explorant dans un premier chapitre la construction du récit officiel, tandis que le deuxième montre l’influence de ce dernier sur l’élaboration de contre-récits résolument engagés. La deuxième partie étudie les pratiques testimoniales, d’abord comme outils du récit de non-fiction au chapitre 3, puis comme discours inscrits dans la tradition latino-américaine du témoignage au chapitre 4. Enfin, la troisième et dernière partie se focalise sur les représentations produites par ces récits, concentrant les réflexions autour de deux thématiques : les représentations de la violence de l’État, au chapitre 5, et celles de la disparition et des disparus, au chapitre 6.
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On September 26, 2014, violent attacks targeted students at the Isidro Burgos Rural Teacher Training School in Ayotzinapa, in the state of Guerrero (Mexico). These events resulted in 6 deaths, dozens of injuries and the disappearance of 43 students. The involvement of several police forces and the presence of the military highlighted the links between official power and organised crime, as well as the use of enforced disappearance. An official version, described as ‘historical truth’ and designed to relieve the state of responsibility, was imposed before the end of the investigation, intensifying popular indignation and fuelling a protest movement on an exceptional scale.
The event also gave rise to a publishing phenomenon, with the publication of some thirty works - mainly surveys, essays, chronicles and eyewitness accounts - raising the question of the conditions under which crime is narrated. This thesis examines this issue through a study of six accounts published in the years following the crime. It analyses how these texts challenge the opposition between art and political activism, by examining the interactions between the aesthetic, ethical and political dimensions. The study uses narratological tools to analyse these narratives in the Mexican context of the ‘Guerra contra el narco’. The first part of this thesis traces the genesis of the alternative narratives of Ayotzinapa, exploring in the first chapter the construction of the official narrative, while the second shows the influence of the latter on the development of resolutely committed counter-narratives. The second part examines testimonial practices, first as tools of non-fiction narrative in chapter 3, then as discourses in the Latin American tradition of testimony in chapter 4. Finally, the third and last part focuses on the representations produced by these narratives, concentrating on two themes: representations of state violence in chapter 5, and representations of disappearance and the disappeared in chapter 6.